Faudrait-il hélas rappeler que la poésie désarme les certitudes, invite à douter, donne à la langue ce qu'elle ne trouvera nulle part ailleurs, brise les miroirs nous renvoyant des images arrêtées de nous-mêmes, saute les verrous du sacré, rêve ?
Une poésie profondément humaniste
2e édition revue et augmentée
Résumé
En se laissant guider par la main chaude des ancêtres, Laure Morali suit les formes et les rêves de la terre, du Brésil au Québec en passant par les Andes, le Chiapas et le Nouveau-Mexique. Ses poèmes recueillent l'humilité des êtres et des choses.
Extrait
La terre
cet animal
quand elle respire
nous marchons
dans son rêve
L'auteure
Laure Morali, poète et auteure de récits, vit à Montréal. Aux éditions Mémoire d'encrier, elle a publié Orange sanguine (poésie, 2014), Traversée de l'Amérique dans les yeux d'un papillon (roman, 2010) et La terre cet animal (poésie, 2003; 2021). Elle a également dirigé l'anthologie de correspondances entre écrivains des Premières Nations et écrivains québécois Aimititau ! Parlons-nous ! (chronique, 2008) et co-dirigé avec Rodney Saint-Éloi le livre-disque Les bruits du monde (chronique, 2012). Elle anime des ateliers d'écriture au Québec, en France, en Haïti.
Le livre
Deux amoureuses se séparent. Seule dans son appartement, entre les livres et les souvenirs, une jeune femme apprivoise la vie, au fil des jours. Écrit sous forme de journal, Coeur yoyo, tel un rite de passage, est à la fois une traversée de l'amour et du deuil.
Extrait
coeur yoyo
oublié au fond d'une poche
celle de la veste
que je ne te rendrai pas
et qui porte encore ton odeur
on s'aime à crédit depuis
longtemps déjà
Point de vue de l'auteur.e
Ceci n'est pas l'histoire d'une peine d'amour, ni même l'histoire de ma survie. Ceci est l'histoire d'un apprentissage.
L'auteur.e
Laura Doyle Péan a 20 ans. Libraire, poète et activiste, elle étudie en droit à l'Université McGill. Coeur Yoyo est son premier livre.
Voix de femmes insoumises
Traduit de l'anglais par Jonathan Lamy
Résumé
Ces poèmes bilingues (anglais-français) se déplacent, multipliant voix, corps, paysages. Chez soi ne cesse de bouger. Chaque poème est un mouvement. Cri de ralliement et de solidarité, Le premier coup de clairon pour réveiller les femmes immorales est un manifeste où retentit une parole résolument engagée.
Extrait
Donnez-moi des femmes-lois
des femmes-gueules
des femmes qui ne la ferment pas
des femmes qui n'ont pas peur
Donnez-moi des femmes monstrueuses
L'auteure
Poète, artiste de la parole et animatrice, Rachel McCrum est née en Irlande du Nord. Elle vit à Montréal depuis 2017 et codirige le Mile End Poets' Festival.
Finaliste, prix de la poésie Jean-Noël-Pontbriand 2022
Seconde sélection, Prix francophone international 2022 du Festival de la poésie de Montréal
Une femme a laissé sa voix sur un lit de préjugés. J'ai reconnu son cri. Je l'habite et le propulse dans mes poèmes.
Au couchant de la terre promise, dédié aux enfants de Joyce Echaquan, est un cri du coeur, une alerte rouge contre l'apathie et l'indifférence.
EXTRAIT
Un blizzard a percé l'écran de ma vie
Tourbillon dans mon coeur
Mon âme l'a saisi
Pour en faire une larme
Qui a mouillé les yeux du monde entier
Le sourire de Joyce m'a dit
Pleure
Apaise les préjugés
Avant que la tempête brise les humains
L'AUTEUR
Wendat du clan de l'Ours, Jean Sioui, poète et romancier, a publié chez Mémoire d'encrier Mon couteau croche (2015) et A'yarahskwa' o J'avance mon chemin (2019).
Résumé
« Faut-il se perdre en l'autre pour mieux se retrouver ? » Pomme Grenade creuse les chemins de l'amour et de l'intimité. Hors frontières et tabous, se laisser aimer, toucher, désirer.
Extrait
Je n'ai aimé
que dans le silence
les camarades de classe au verbe-fleuve
mon lit amical
alors
ne prends pas peur
quand tu entendras
ma voix
je n'ai jamais appris
à parler au rythme d'un coeur
qui n'est pas le tien.
Point de vue de l'autrice
Quand on vient d'une culture qui n'est pas celle qui domine, nos cellules familiales nous font comprendre que malgré la cohabitation, même si on est « intégré » socialement, et professionnellement, il y a une limite (inconsciente ou parfois même nommée) qu'on ne doit pas franchir. Cette limite, c'est celle de l'intimité, la frontière du corps. C'est ce désir que je veux écrire. Écrire sur la beauté qui émerge de cette curiosité à découvrir l'autre.
L'autrice
Elkahna Talbi est autrice, comédienne et artiste de Spoken Word sous le nom de Queen Ka. Son premier recueil de poésie, Moi, figuier sous la neige (Mémoire d'encrier, 2018), a été sélectionné parmi les meilleurs livres 2018 selon Plus on est de fous, plus on lit ! et Les Libraires, en plus d'être lauréat des Prix CoPo des Lycéens 2019.
« Un voyage d'amour sous les eaux.
Fluidité et célébration pour invoquer l'être aimé. »
Résumé
Nuit des anses pleines dit le voyage sous les eaux, là où se croisent les mystères de l'amour. Fluidité. Célébration de l'être aimé. Le poème invoque corps et présence. Le désir remonte lacs, rivières, fleuves, mers. L'univers liquide donne à voir et à rêver. La seule espérance : plonger au coeur du sentiment.
Extrait
Je marche campé entre deux eaux
jusqu'à tes yeux
il n'y a pas de miracle
renouvelé de promesses
femme de mes dix doigts
L'auteur
Poète, Franz Benjamin célèbre la vie à travers ses livres. Il est député de la circonscription de Viau à l'Assemblée nationale du Québec depuis octobre 2018.
Une méditation sur la mort, la vie et l'amour.
Résumé
Mourir. Malgré la vie. Malgré la joie. Mourir. Peut-être renaître un jour. Conte-poème au pays des Inuits et des coureurs de froid. Accueilli et soigné au Nunavik, l'aventurier blessé médite sur la mort, la vie et l'amour. C'est dans la toundra que le rescapé retrouvera la force de vivre.
Extrait
Je vous connais gens du Nord
Bien-aimés nomades depuis des lustres
Qui parcourez cette terre
De loups-marins et d'eaux
Je vous connais mes courageux
Et même si je ne vous connaissais pas
Vous me recueilleriez en disant
Bienvenue à toi le pauvret
Celui dont la jambe traîne comme une peau
Entre qu'on te serve un thé brûlant
Viens dans la chaleur de notre abri
L'auteur
Poète, médecin, nomade, voyageur et vagabond, Jean Désy vit autour de Québec, il est toujours en partance entre les îles, les toundras et les taïgas. Il est l'auteur d'une oeuvre profondément humaine. Il a publié chez Mémoire d'encrier Uashtessiu / Lumière d'automne (en collaboration avec Rita Mestokosho, 2010), Chez les ours (2012), Isuma, anthologie de poésie nordique (2013), Bras-du-Nord (en collaboration avec Normand Génois, 2015), Amériquoisie (2016), Chorbacks (2017) et Hymne à l'amoune (2019).
Finaliste, Prix des libraires 2022
Résumé
Une fillette grandit sous la dictature. Loin de son pays, elle a cru tout oublier. Quarante ans plus tard, son enfance frappe à la porte. « J'ai fouillé, passé des heures à éplucher les documents, les témoignages, les jugements, les histoires, les photos, les vidéos. Le ventre retourné, j'écrivais des poèmes. »
Extrait
dans la cour d'école
on joue à la marelle
on sautille sur un pied
l'équilibre est fragile
puis sur l'autre plus haut
on rebondit
pour atteindre le ciel
criblé de barbelés
Point de vue de l'auteure
Je dédie ces poèmes - une potion contre l'indifférence - aux familles qui cherchent encore leurs proches, aux enfants qui n'ont pas connu leurs parents. Je dis, comme eux, comme elles : ni oubli ni pardon.
L'auteure
Née à Buenos Aires, Flavia Garcia est professeure de français, traductrice et interprète. En 2016, elle publie son premier recueil de poésie, Partir ou mourir un peu plus loin, chez Mémoire d'encrier. Fouiller les décombres , son deuxième recueil, paraît en mai 2021. Elle vit à Montréal depuis 1987.
Paru dans le cadre du 45e anniversaire du coup d'État de 1976 en Argentine, et en souvenir des victimes de la dictature.
Résumé
« Je porte cette histoire en moi remplie de silences. L'Europe et l'Amérique autochtone, le colon et la colonisée, c'est chez moi. Chez nous, c'est l'abattoir. » Enfant de deux mondes qui ne se parlent pas, la fille écrit à sa grand-mère et à sa mère. Elle parcourt l'espace dilaté des origines, des impostures et des blessures.
Extrait
j'écris pour nourrir mon ventre vide du passé le regard tendre que je n'ai pas eu
pour apprendre à coudre
les trous dans mon manteau d'hiver
à me repenser autrement qu'aux bordures pour revenir à l'heure du constat de la mort dans la prison aux barbelés
la mort des corps que personne ne pleure
tu sais
la mort des corps qui ne coûtent pas cher
L'autrice
Née à Córdoba, Argentine, d'une mère guaraní-paraguayenne et d'un père français, Fiorella Boucher vit à Montréal. Sa poésie, une plongée dans le récit familial, s'inspire de son héritage autochtone. L'abattoir c'est chez nous est son premier livre.
David Bouchet s'adresse à l'île de son enfance, Gorée, à la femme aimée, et au pays qui l'a vu grandir, enfant blanc dans un pays noir. Face à son corps, à sa mémoire et à ses doutes, le poète pose la question : me reconnaissez-vous ? "Noir lumière" est une ode aux voix racinées déracinées qui revendiquent l'utopie.
"être soi être nous
être de tout ce qui nous lie dans ce que nous avons de racines et de branches cèdre du chouf, baobab pétrifié, érable des neiges nos bras levés au ciel tendus vers ces étoiles troublantes et solitaires de notre sang d'être, de notre sève libre et consumée, écoulante et bulleuse, d'où éclosent à foison les plus belles nébuleuses"
Écrivain, poète et scénariste, David Bouchet, né en France, vit à Gorée dès la petite enfance, puis à Fann-Hock, quartier melting-pot de Dakar. Son premier roman "Soleil" (La Peuplade, 2015) a connu un grand succès. David Bouchet est également le scénariste de deux films : "La pirogue" (2012), réalisation de Moussa Touré, et "Wallay" (2017), réalisation de Berni Goldblatt.
Deux femmes s'écrivent. Ouanessa Younsi, née d'une mère québécoise et d'un père algérien, représente la nouvelle génération de poètes québécoises. Louise Dupré, marquée par le bouillonnement de la Révolution tranquille, est l'autrice d'une oeuvre considérable. Les deux se racontent. "Nous ne sommes pas des fées" met en dialogue deux générations et expériences. Chemins d'amitié et de poésie entre femmes.
RÉSUMÉ:
Survivante d'un féminicide, Geneviève Rioux écrit ce recueil de poésie comme une reprise de pouvoir et de liberté. Au fil des poèmes se construit une réflexion sur l'improbable répétition de la violence vécue de mère en fille en des lieux et des temps éloignés. La poète donne voix à la souffrance d'une famille, à celle des ami.es, des proches et des connaissances, toutes et tous victimes de ces violences. Survivaces invite à penser la réparation autrement, non par cet autre qui inflige la violence, mais par ces autres qui apaisent et accompagnent les survivantes. Une écriture rythmée, brève, organique, près du corps et du coeur et dont la justesse des images invoquées permettent aux lectrices et aux lecteurs de plonger à même cette quête de sens et de vérité. Un recueil comme une inspiration profonde, l'intime conviction de vivre à nouveau.
L'AUTRICE:
Née en 1992 à Rimouski, Geneviève est psychologue. Elle découvre la poésie dès l'enfance grâce à L'armoire des jours de Gilles Vigneault. Elle vit à Sherbrooke où elle poursuit sa passion pour l'écriture, la philosophie et des recherches en psychologie. Elle travaille au CIUSSS de l'Estrie.
Victime d'une tentative d'agression sexuelle et de meurtre, Geneviève Rioux refuse d'être réduite au silence. Elle met en poésie son expérience à la fois douloureuse et salvatrice.
EXTRAIT:
Je veux vivre à tue-tête
Tes dents serrées sifflent
Je t'avais dit de pas crier
Mais j'ai appris depuis
1999, la résistance
On se défend
De se fendre
Violées
De mère en fille
Survivaces
De fille en mère
********
Contrainte
À rouvrir les plaies
Ma mère voit
Sans suture, visage poignardé
Son enfant
Dix-huit coups de couteau
Percent ma chair
Et son regard
Sur ce qu'il en coûte d'être
L'une parmi Nous
****
Ma parole pour toutes
Celles qu'on a tues
Celles qu'on a tuées
Avant-goût de métal
Je me délie la langue
Dominée, indomptable
À qui la cage, à qui la cage?
RÉSUMÉ:
Vif oubli est une introspection sur la perte et la violence dans un monde qui détruit jour après jour ce qui nous reste
d'humanité. Entre les souvenirs et le présent, le poète dit la perte comme moteur de construction identitaire. Des
scènes du quotidien d'hommes abîmés par la vie se fracassent les unes contre les autres. Harcèlement, violence,
colère, pauvreté, toxicomanie. Le poète pose la question : qui est l'agresseur et qui est la victime dans un monde qui
ne laisse aucune voie de sortie ?
Reste la poésie, l'amour de la littérature. Le poète, tendu vers la nature, vers la femme aimée qui lui a brisé le coeur,
cherche à rétablir une part d'humanité dans la fragilité de l'amour éphémère.
AUTEUR:
David Goudreault est travailleur social, romancier et poète. Directeur artistique
de la Grande Nuit de la Poésie de St-Venant, il a publié trois recueils de poésie
aux Écrits des Forges et quatre romans aux Éditions Stanké. Le plus récent,
Ta mort à moi, a été finaliste au Prix France-Québec 2020.
Premier Québécois à remporter la Coupe du monde de poésie en 2011, il
a aussi reçu la médaille de l'Assemblée nationale en 2012, le Grand Prix
littéraire Archambault en 2016 et le Prix Lèvres Urbaines en 2017 pour sa
contribution au rayonnement de la poésie québécoise. Son spectacle solo, Au
bout de ta langue, s'est vu décerner quatre prix de la Bourse RIDEAU 2018. En 2021, il reçoit le Prix Clémence-DesRochers pour
l'excellence de l'imaginaire.
EXTRAIT:
Rechute : recherche et développement
Des pilules en flocons, de la cendre au litre
Pour chasser la déréliction
À l'arbalète
Vers vingt heures et triste, un peu avant que la grande
aiguille ne touche le gouffre, je bois de l'eau. L'heure est
venue, je ne bouge pas. Sur une échelle de tout ou rien,
je flotte à côté. L'erreur est une expérience. L'errance,
une expertise.
La Corée du Nord
Au fond d'un sachet de Playtex
Les anges aux yeux crevés me reconnaissent
Au retour de la pause, ma mort sera anecdotique
***
Un parc à démons tranquilles
Pour incubes amènes, goules avenantes
Plein la sainte sacristie profanée
Je troque mon bain de sang pour un café gris
On peut noyer ses peines, ça ne nous débarrasse pas
de leurs cadavres. Les ressentiments éthyliques rusent,
nous habitent et nous possèdent. S'affranchir, s'en
arracher demeure un geste radical d'amour envers soi,
une lente vigilance.
Alcoolique fonctionnel du mois
Je cache bien mon jeu, et mes échasses
Me suis toujours imaginé plus grand
En personne
***
Dans ces villes éprouvées où les ruelles se taisent,
privées de fous et d'enfance, j'errerais presque,
je déambule. Aux envies de tout brûler, de repeindre
chaque mur, d'ensevelir la grisaille séculaire, se tressent
mes fatigues.
Un jour ou l'autre, ce sera un autre jour et par la parole
à jamais encagée, le roman se fera poème et le poème
parfait s'effacera. Le calme accompli, une abdication.
Je ne joue jamais avec le feu
C'est l'incendie qui se joue de moi