Sur un air de Leonard Cohen, la poète Laure Morali marche dans la ville de Montréal. Elle s'arrête, médite et écrit d'une rue à l'autre. D'un rêve à l'autre. Entre en résonance avec les mots et les lettres. Engage le dialogue avec l'ange. Les mots se détachent et dans leur miroir, tout s'éclaire ou s'efface. Personne seulement est une méditation sur l'ombre et la lumière, sur les paradoxes et les forces opposées qui nous fondent, ensemencent nos vies et nos actes.
Point de vue de l'autrice:
Dans ce dialogue avec l'ange, les poèmes se renvoient des mots miroirs, à user pour en effacer les reflets et réussir à voir, en transparence, leur dimension cachée, des éclats à assembler à l'intérieur d'un vitrail par où la lueur d'un autre univers pourra filtrer. Une langue sacrée miroite derrière le langage quotidien. Le mot nuit émet une vibration plus lumineuse que le mot jour. Le jour naît de la nuit.
En se laissant guider par la main chaude des ancêtres, Laure Morali suit les formes et les rêves de la terre, du Brésil au Québec en passant par les Andes, le Chiapas et le Nouveau-Mexique. Ses poèmes recueillent l'humilité des êtres et des choses.
Il y a dans ces paysages maritimes une force qui nous dépasse.
Comment en nier la beauté primitive, envoûtante, qui nous submerge calmement ?
C'est ainsi.
Le soleil se lève, dans toute sa splendeur juvénile, encore pudique.
C'est ainsi, le soleil se couche dans ses amples teintes extravagantes et chaleureuses.
Nous marchons sur le rivage. Pieds nus. L'eau transparente glisse devant nous, entre nos orteils, puis se retire avec sa dentelle de bulles et d'écumes, avec ses habits d'algues, de coquillages et de sable dégringolant.
Nous marchons sur le rivage, attentifs à l'eau fraîche qui lèche nos pieds, à la lumière qui joue de ses couleurs jusqu'au plus intime de sa symphonie.
C'est ainsi.
C'est beau et intense.
C'est ici que Chris Friel nous entraîne. Sur ces rivages sauvages et magnifiques. Sur ces plages inconnues et pourtant familières.
Comme des tableaux à la mouvance lumineuse, les photographies de Chris Friel nous donnent à voir/toucher/ressentir la rémanence de paysages immuables. Par la profondeur de ses clichés, il nous offre l'empreinte unique - chargée de force, de couleurs et de textures - et sans cesse renouvelée de ces plages que nous avons tous un jour parcourues.
Cela pourrait être n'importe où sur cette planète. Une plage quelconque d'un quelconque pays. Nous sommes de toute façon chez nous.
Là où nous n'avons jamais cessé d'être.
Nous marchons sur ce bord de plage. L'eau glisse, se pose puis repart, joue de sa transparence sur le relief de nos jours fatigués.
Nous marchons, pensées perdues, égarées entre air eau et sable, quelque part dans cette interface fragile et éphémère, sur la ligne scintillante des éléments qui se fondent et se confondent. Pensées en vagues folles, violentes et intrusives, ou encore timides, à peine un voile nacré et elles ne sont déjà plus.
Nous marchons aux côtés de Laure Morali, empruntons la trace de ses pas sur le sable humide, sur ce rivage inondé de lumière, dans cette clairvoyance des instants incisifs. Acuité des émotions qui filent se diluer et renaitre dans les vagues. Entre l'écume rose et le miroitement de l'eau.
Nous suivons Laure Morali, au coeur même du voyage, dans son flot émouvant. Et écoutons. Percevons. La force des marées, de ce qu'elles remuent en nous. Au tréfonds. Là où cela brûle, et consume. Là où cela palpite. En dedans. Cela joue sur nos ancres enfantines, contracte nos amarres. Et nous tenons tant bien que mal, fragiles et ballotés.
Nous tenons, en partie dilués par l'iode et le vent.
Cela pourrait être n'importe quelle année en arrière, après tout. N'importe quel jour, mois ou même saison. Cela pourrait être aujourd'hui. Ou même demain.
Quelle importance ?
Le Cercle du rivage est un voyage, une marche lente et aiguisée sur le fil de nos sens et de nos perceptions intimes. Un voyage vers notre renaissance.
Un grain d'éternité, précieux, battu par les marées et le vent du large.
Et que nous protégeons précieusement dans l'alcôve de nos mains.
Louise Imagine
Aimititau ! Parlons nous ! réunit pour la première fois des auteurs du Québec et des Premières Nations, à travers des correspondances inédites qui prennent la forme de lettres, de récits, de courriels, de poèmes et de contes. Vingt-neuf auteurs, confirmés et jeunes, sont rassemblés ici par le désir de mieux se connaître. Ils initient le dialogue et rompent les solitudes.
Les écrivains jumelés s'écrivent des mois durant jusqu'à faire surgir une oeuvre faite de tendresse et d'inquiétude, de révolte et d'espoir. Les grandes et incontournables questions humaines reviennent d'une correspondance une autre.
Aimititau! Parlons-nous! donne à lire une multitude de voix et de points de vue, qui expriment la manière d'être ensemble, d'habiter la même terre et de vivre dans le respect de l'autre. Véritable action de solidarité. Résonances d'une lettre à une autre, d'un tourment à un autre, d'une joie à une autre, pour se rejoindre dans la fraternité des mots.
Vivre sa parole
comme on vit avec ses yeux
chaque mot attend son heure
ce que l'on voit revient
d'un temps collé
à l'ombre
le terre n'est jamais loin
du ciel
Laure Morali nous dit: Mon grand-père avait perdu son pays et me le rendait chaque matin en me faisant boire le jus de l'orange sanguine. Offrir le monde dans un fruit, tel est le don de la poésie. L'humanité au creux de la main tendue, portée par le poème.
Traversée de l'Amérique dans les yeux d'un papillon relie les êtres, les paysages et les cultures.
Tout y est lumière, fluidité, nuances.
Le roman retrace l'itinéraire d'une jeune femme assoiffée du monde. Ce voyage initiatique la guide aux quatre coins des
Amériques : Alaska, Guyane, Nouveau-Mexique, Montréal, Innu-Assi. Comme si seul l'exil savait guérir les blessures.
Une langue sobre et exigeante :mosaïque où jaillissent formes et couleurs. La voix discrète des ancêtres, les rencontres de hasard, la mémoire des lieux, la force des mots et des silences gravent précieusement les tracés de l'histoire. Histoire que l'on se raconte la nuit
afin d'inventer son propre chemin.
C'est d'abord un chant de retour.
Une femme revient sur une île de Bretagne, dans le paysage de mer où elle a grandi. Elle habite sous un phare, et la nuit ravive les fantômes. Entre le pays et soi, désormais, un décalage, par toutes ces années d'Amérique collées sur la peau.
Alors lancer des mots à la mer, par petits éclats, comme les messages des sémaphores. Une adresse à un aïeul, un capitaine qui est allé se perdre à l'ouest aussi, longtemps avant. Et le reflux des souvenirs, premières amours, cassures et dérives, pour s'éclairer où il y a eu partage des eaux, entre rester et s'en aller.
"Tout ce que nous aurions pu faire si nous n'étions pas partis au loin est resté là, inachevé. Les fantômes ne sont pas des morts, ce sont des vies que nous avons laissées en suspens."
Ce livre est disponible en papier et en numérique > http://www.publie.net/livre/comment-va-le-monde-avec-toi-laure-morali/
Des rues de Montréal au village nordique de Salluit, de la Bretagne du Nord à l'Afrique du Sud, en passant par la Grèce antique et la Bulgarie postsoviétique, le 150e numéro de la revue Les écrits a beaucoup voyagé. Il a ramené de ses périples de nouveaux extraits inédits des carnets d'André Major ; des récits de Laure Morali, Benjamin Hoffmann, André Carpentier, Jean Désy et Vincent Brault ; des poèmes de Michaël La Chance, Patrice Desbiens, Jonathan Lamy, Laurent Cauchon et Jean-François Bernier ; une oeuvre théâtrale de Dario Larouche ; une suite de poèmes bulgares traduits par Marie Vrinat ; et des chroniques littéraires de Sherry Simon et Raymond Gervais, qui signe aussi dans ce numéro un portfolio d'oeuvres visuelles inspirées par la musique et qui explorent les rapports entre la vue et l'ouïe, le regard et l'écoute, le regard qui écoute...
Pendant quatre ans, les écrivaines Joséphine Bacon et Laure Morali ont sillonné les dix communautés innues du Québec. Elles ont rencontré plus d'un millier d'enfants et de jeunes qu'elles ont accompagnés dans l'écriture. Nin auass - Moi l'enfant fait battre le coeur de la jeunesse de tout un peuple.
Anthologie bilingue innu-aimun - français
Dirigée par Joséphine Bacon et Laure Morali, et illustrée par Lydia Mestokosho-Paradis
En collaboration avec l'Institut Tshakapesh
Point de vue des créatrices
En innu-aimun, le mot « poésie » se dit Kashekau-aimun, ce qui signifie « parole de fierté », de cette fierté que peut éprouver un jeune chasseur, empli de joie, lorsqu'il a effectué avec succès sa première chasse. Un sentiment de fierté et de joie naîtra de cette grande aventure littéraire. Joséphine Bacon
Les enfants sont poètes. Nous avons réveillé la poésie qu'ils avaient déjà en eux et ils nous ont inondées de leur sagesse. Ce livre représente une remontée à la source. Laure Morali
Avec mon coeur d'enfant, j'ai essayé de voir les images que les jeunes ont voulu exprimer. C'est épuré, c'est abstrait. Je n'impose pas ma vision. Les enfants pourront reconnaître leur propre message dans mes dessins. Lydia Mestokosho-Paradis
Nous livrons des bruits récoltés en passant au tamis la clameur du monde. Bruits de l'enfance, bruits de la vie,
bruits de la mort, bruits des pas, bruits des rêves, bruits des langues, bruits du désir, bruits du silence, bruits du
soleil... Voix fragiles, peuplées de rivières, de vies cheminant dans les mêmes sentiers, les mêmes résonnances. Peu
importe si l'on vient d'Amérique, d'Europe, d'Asie, d'Océanie ou d'Afrique. Nous mêlons les cartes d'identité.
Par la force souterraine de l'écriture, nous devenons des voyageurs clandestins dans nos propres pays.
La littérature, libérée des catégories identitaires, respire.
Un chant commun s'élève : la délicate rumeur du monde.